Postures de droite, postures de gauche

par Boris Enet |  publié le 16/10/2024

Le débat budgétaire appliqué à l’école se solde comme toujours par une opposition de façade entre ceux qui défendraient l’augmentation de sa dotation par principe et ceux qui exigeraient une cure d’amincissement…par principe. Zéro pointé.

Salle de classe vide au collège Claude Debussy à Aulnay-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis, en mars 2024 (Photo de Xose Bouzas / Hans Lucas via AFP)

Évacuons tout de suite le positionnement d’une droite arriérée qui méconnait l’école publique sans doute parce qu’elle inscrit ses progénitures dans le privé. La proposition des parlementaires socialistes exigeant de l’école privée sa part de solidarité nationale a été battue en brèche, autant par idéologie que par intérêts de caste.

Interrogée, l’actuelle numéro deux du Ministère de l’Education Nationale, Madame Pascal, directrice générale de l’enseignement scolaire (Dgesco) ne voit d’ailleurs rien à redire sur les enseignements prodigués par le collège Stanislas, dénoncés par ses propres services.

Quant à la baisse annoncée de 4000 postes d’enseignants – auxquels il revient de soustraire 2000 postes d’AESH (Accompagnants d’élèves en situation de Handicap) – ils sont justifiés par la courbe démographique ! Carcan obsessionnel comptable : les caciques de la droite parlementaire soustraient par nature

Les sénateurs LR n’en finissent pas d’applaudir à ce début de relèvement des comptes publics, en bon père de famille. Tant pis pour la crédibilité lorsqu’il s’agira de dénoncer la mauvaise gestion de la rue de Grenelle, notamment celle des remplaçants des professeurs absents. Celles et ceux qui ont des enfants dans l’école de la République en font l’amère expérience plusieurs fois par trimestre (quand ce n’est pas chaque semaine dans les quartiers les plus défavorisés). Messieurs Retailleau et Larcher n’y vivent et n’y mangent pas.

Que dit la gauche face à cette éternelle posture ?

Elle en adopte une autre, consistant à dénoncer, quel que soit le lieu et le temps, la logique libérale à l’œuvre.
Elle rappelle avec raison les efforts entrepris sous François Hollande, mais en oublie les quelques bons points attribués à la gouvernance Macron en ce qui concerne le premier degré et le dédoublement des classes de CP dans les quartiers sensibles, étendus à d’autres niveaux et d’autres quartiers plus mixtes.

La gauche s’enferme elle aussi dans une posture, strictement quantitative, négligeant une fois encore de soulever la question qui fâche : comment se fait-il qu’un mammouth de 63 milliards d’euros, obtienne des résultats aussi médiocres ? Un non-dit qui rappelle l’éducation à la sexualité à Stanislas : mieux vaut ne pas en parler ou alors à l’abri des regards.
Qu’aurait pu avancer une gauche authentique et sérieuse, sans déni du réel ?

L’approche strictement quantitative est absurde dans un territoire aussi fragmenté et disparate. Une alternative plus décentralisée des moyens, à bonne échelle, se pratique ailleurs en Europe. Mais encore faut-il en accepter le principe et le débat sur le statut.

Des contrepropositions pourraient évidemment être proposées en termes de gestion des deniers publics. Non pour supprimer des postes d’enseignants indispensables, mais pour tailler dans une superstructure que la Cour des Comptes dénonce avec constance.

Oui, l’école inclusive est un vrai et beau défi qui nécessite davantage d’AESH à la condition d’améliorer la condition salariale de ces travailleurs sociaux et de recruter qualitativement – un leurre aujourd’hui.

Au lieu de décliner des propositions utiles à la démocratie et au pays, une sempiternelle impasse, dans laquelle les rôles sont d’emblée distribués, se joue à nouveau.

Tant pis pour l’école.

Boris Enet