PS : Épinay, le retour
Derrière cette référence historique que les moins de vingt ans connaissent peu, se cache l’espoir de voir le courant sociale-démocrate reprendre la tête de la gauche pour lui rendre ses chances de victoire.

À mesure que les échéances se rapprochent, le puzzle de la gauche antipopuliste se met en place. La galaxie est éparse et les acteurs sont divers mais la volonté de s’extraire d’un NFP sous tutelle de LFI est unanime. Un seul objectif : mettre la gauche en mesure de se qualifier pour le second tour de la présidentielle et éviter du même coup la victoire de l’extrême-droite. Pour ce faire, pas question d’organiser une quelconque primaire. Cette machine à perdre radicalise les positions et interdit du même coup le rassemblement de l’électorat, seul susceptible de passer le premier tour. D’autant que la primaire ne conjurerait en rien la menace Mélenchon : le chef de LFI a annoncé qu’il se présenterait en tout état de cause.
Dans ce cadre, les grandes manœuvres battent leur plein. Dans un récent entretien à la revue L’Hémicycle, l’ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve, dont Guillaume Lacroix président du PRG est un ardent soutien, propose la fusion de son mouvement avec celui de Raphaël Glucksmann, Place Publique, sans rien exiger en retour, si ce n’est l’approfondissement d’une orientation commune, notamment dans le domaine international. Cela tombe bien puisque le même souci s’est exprimé en clôture du dernier congrès de Place Publique, par la voix de celui qui fut avec succès tête de liste aux Européennes.
En attendant la conclusion de ce deal en marge du PS, la nouveauté principale viendra d’un changement de direction socialiste, si elle a lieu à l’issue du congrès de Nancy début juin. Certes les chefs actuels de parti occupent l’espace médiatique. Mais les partisans d’une nouvelle donne semblent en bien meilleure posture qu’en 2022. Le courant d’Hélène Geoffroy dont la cohérence et la constance sont reconnues, devrait faire cause commune avec celui de Nicolas Mayer-Rossignol, où Carole Delga et Michaël Delafosse représentent les quinquas en devenir. À cette base solide s’ajoutent les personnalités qui ont quitté l’ex-majorité, tels Jérôme Guedj, Laurence Rossignol ou Karim Bouamrane, tandis que Boris Vallaud, président du groupe socialiste à l’Assemblée, a acté sa séparation d’avec Olivier Faure.
Le regain d’adhésions annoncé en fanfare par l’actuel premier secrétaire n’a pas eu lieu, preuve s’il en est que le message socialiste est brouillé auprès des sympathisants. Au contraire, la perspective d’un « nouvel Épinay », ce congrès d’unité qui avait en son temps ouvert une époque nouvelle pour le parti, pourrait les mobiliser. Il dessine en pointillé une nouvelle majorité socialiste, qui laisserait de côté la énième resucée du NFP, avec ou sans LFI, seule idée stratégique d’Olivier Faure.
Alors que la gauche stagne sous la barre des 30%, sa composante sociale-démocrate reprend des forces. C’est parce qu’elle propose une perspective à ses électeurs traditionnels, comme à ceux qui l’ont abandonnée en 2017 pour rejoindre Emmanuel Macron. La gauche radicale a fait illusion avec le mythe de l’unité à tout prix, au mépris des valeurs démocratiques, pour un résultat décevant, qui n’a nullement freiné l’ascension de l’extrême-droite. Un constat qui interroge de plus en plus d’électeurs de gauche et du centre, attachés à la démocratie sociale, à la construction européenne et à une plus juste répartition des richesses.
Bien sûr, la construction du nouvel édifice est lente. Elle doit respecter les rythmes de chacune des structures et elle laisse ouverte la question de l’organisation future : nouveau parti ou maison commune des gauches, sur le modèle italien de la fin du siècle dernier ? Qu’importe à ce stade, puisqu’elle nourrit enfin l’espoir de voir renaître une gauche plurielle débarrassée de la parenthèse populiste.