Quand le bâtiment va, tout va !

publié le 23/07/2023

Par Guillaume Hublot, docteur en droit.

 Crise du logement :  toujours le même discours!  Pas suffisamment de constructions. L’argument explique aussi bien  la hausse des prix que les difficultés des constructeurs. En réalité; le thème – caché – est plutôt celui du » mal logement »

France, Saone et Loire, Macon, Maison de Bois - Photo OLART Fabien / Hemis.fr /

Cet argument universel autant qu’intemporel ne résiste pas aux chiffres. Selon l’INSEE, la France métropolitaine comptait en 2021 36,2 millions de logements, dont près de 82 % de résidences principales, enregistrant une croissance de 1,1% par an sur les 30 dernières années. + 33 %.

Dans le même temps la population française progressait de 14%, soit deux fois moins vite que le parc immobilier. En unité, la progression est à peu près égale : + 7,5 millions environ.

Les études comparatives avec l’Allemagne sont également éclairantes : sur les années 2000-2012 (institut IGEDD), on construit en France 3% de plus que de nouveaux ménages, contre seulement +0,4% en Allemagne. A l’époque, seule la France se désolait de la hausse des prix, qu’on imputait au manque de constructions nouvelles.

La cause de nos maux est donc sans doute ailleurs. La statistique sur les logements vacants peut aider. 8% des logements sont en moyenne vacants, chiffre en augmentation continuelle.

 Mais la répartition géographique est encore plus intéressante : très peu de vacances dans les 14 premières villes françaises alors qu’elle peut monter à plus de 17% dans les territoires ruraux et les petites et moyennes villes.

 La vacance immobilière constitue ainsi l’une des clefs de lecture de l’abandon du territoire. Sans surprise, la carte de logements en situation de suroccupation est inversement proportionnelle.

Devant l’explication simpliste mais bien avantageuse du besoin de construire, nos déboires s’expliquent plus par une absence d’adéquation aux besoins de la population et à une absence de vision du territoire : on réduit les trains, on ferme des gares, puis des écoles, puis les services de santé, on finit par s’étonner de l’absence de médecins, puis on constate le départ des populations vers d’autres villes plus importantes.

 Pour redonner un peu de vigueur aux premières, l’État décide de programmes immobiliers de défiscalisation. On pourrait presque caricaturer : on construit là où l’on détruit l’économie, et on contraint la construction là où l’économie se développe !

Dans cette équation inepte réside sans doute les raisons principales de prix trop élevés, d’une inadaptation des logements aux besoins, de l’artificialisation galopante des sols et enfin du sentiment d’abandon vécu par la France rurale et semi-rurale.

Penser un aménagement viable du territoire, considérant que chaque région a son importance, permettrait sans doute d’en finir avec le mythe d’une construction insuffisante tout en résolvant le mal logement et préparer le défi de l’artificialisation nette zéro, prévue pour 2050.