Quand Meloni discrimine les enfants
L’extrême-droite au pouvoir en Italie se lance dans une brusque opération anti-LGBT, visant à s’attaquer aux familles homoparentales
On croit parfois l’extrême-droite en cours de banalisation : on se trompe. À l’appui de cette idée, on convoque souvent l’exemple de Giorgia Meloni, présidente du gouvernement italien depuis un peu moins d’un an.
La cheffe du parti ultra-conservateur Fratelli d’Italia mène une politique économique plutôt raisonnable et s’insère sans trop de heurts dans le concert européen. Est-ce à dire qu’elle s’est normalisée ? Certainement pas. Peu à peu, sa vraie nature revient au premier plan.
Exemple : son gouvernement a décidé de s’attaquer de manière brutale aux droits des couples homosexuels, conformément au mot d’ordre qu’elle avait utilisé pendant sa campagne : « Dieu, patrie, famille ».
Comme le relève Le Monde, à Padoue, en Vénétie, le parquet (l’émanation du ministère de la Justice) a réclamé au tribunal que les actes de naissance d’enfants de couples de femmes nés d’une procréation médicalement assistée (PMA) à l’étranger soient modifiés afin d’en effacer le nom de la mère non-biologique.
Pour l’instant, cette consigne ne concerne qu’une seule ville, soit une trentaine de familles, et il n’est pas dit que les tribunaux italiens donneront raison à l’État. Mais si Giorgia Meloni parvient à ses fins, ce sont tous les couples gays du pays qui sont à terme concernés.
L’affaire n’a rien de symbolique. Une fois le nom de la mère non-biologique effacé de l’état-civil, celle-ci perd sur l’enfant du couple des droits élémentaires. Il lui faut une lettre de sa compagne pour aller chercher son enfant à l’école, elle ne pourra plus signer d’autorisation de sortie scolaire ni voyager seule avec lui.
Et en cas de décès de la mère biologique, elle n’a plus aucun droit légal sur sa garde et l’enfant devient pupille de la nation. Il faut ajouter à cela le fait que les mesures prévues sont rétroactives : il s’agit de renverser les décisions des autorités locales parfois prises depuis des années.
Bien entendu, cette offensive anti-LGBT – et présentée comme telle – est déclenchée au nom de la protection des enfants : pour Meloni, seules les familles classiques sont à même de les élever, les autres contre « contre-nature ».
C’est sans doute pour cette raison que les demandes du gouvernement ont pour premier effet d’humilier les mères non-biologiques et de placer un mur juridique entre elles et les enfants qu’elles élèvent, déséquilibrant complètement ces familles qui se croyaient admises par la société italienne.
Telle est la vraie nature de l’extrême-droite, qui peut faire des concessions de forme mais ne renonce pas à ses objectifs : faire passer ses dogmes obscurantistes avant l’intérêt évident des citoyennes et des citoyens. Même en bas âge…