Qui, sinon Bernard Cazeneuve ?

par Valérie Lecasble |  publié le 24/08/2024

L’ex-Premier Ministre de François Hollande paraît le mieux placé pour remplir les conditions d’une nomination à Matignon. Sauf à créer une de ces surprises qu’affectionne Emmanuel Macron.

Bernard Cazeneuve- Photo LIONEL BONAVENTURE / AFP

Voici donc Emmanuel Macron contraint de nommer dans les jours prochains un Premier Ministre. Depuis un mois et demi, il tergiverse et toutes les hypothèses ont été évoquées, de la gauche à la droite, des plus logiques au plus inattendues, en excluant toutefois les extrêmes. Désormais, la trêve des Jeux Olympiques est terminée et Gabriel Attal, démissionnaire et désavoué, ne peut rester indéfiniment à son poste : le Président de la République ne peut plus reculer.

Pour mettre en scène et tenter de légitimer une décision qu’il veut faire passer pour consensuelle, il a convié les chefs des partis politiques à venir échanger avec lui à l’Élysée. Avec trois blocs minoritaires élus le 7 juillet à l’Assemblée nationale, jamais Premier ministre n’a été aussi difficile à nommer et nul ne sait ce qu’Emmanuel Macron a en tête. Mais un candidat se détache du lot, ne serait-ce que par élimination.

Arrivé en tête aux élections législatives avec cependant un déficit d’une centaine de députés pour atteindre la majorité, le Nouveau Front Populaire présente une gauche unie et décidée à promouvoir sa candidate, Lucie Castets qui a fait courageusement campagne pour tenter de s’imposer depuis un mois qu’elle a été choisie par le PS, EELV, le PC et LFI réunis. Mais Gabriel Attal et Laurent Wauquiez annoncent qu’ils voteraient une motion de censure contre tout gouvernement qui compterait dans ses rangs des ministres portant l’étiquette de La France Insoumise. Ils seraient sans doute rejoints par le Rassemblement national, qui affiche la même intention. Exit donc, donc, l’hypothèse d’un Premier ministre issu du Nouveau Front Populaire.

Gabriel Attal assure à Emmanuel Macron qu’en raison de la défaite de la majorité présidentielle, le prochain locataire de Matignon ne pourra être issu de son camp, ni Renaissance, ni Horizons ne souhaitant donner le sentiment de bénéficier d’un hold-up électoral. Laurent Wauquiez décline lui aussi le poste pour la Droite Républicaine qu’il préside à l’Assemblée nationale, affirmant que son groupe ne participera à aucune coalition gouvernementale. Enfin, la nomination d’un Xavier Bertrand ou même d’un Gérard Larcher aurait l’inconvénient d’être issue d’un courant – Les Républicains – très minoritaire aux élections législatives. L’imbroglio paraît total. Qui pour gouverner sans la gauche unie qui inclut LFI, sans le bloc central, et sans la droite ?

La logique est pourtant claire. Parmi les premiers ministrables évoqués, Bernard Cazeneuve paraît le plus légitime. Locataire de Matignon sous François Hollande, il a l’expérience de l’Etat contrairement à une Lucie Castets, qui sans démériter est inconnue en politique. Il a un parcours de gauche qui a l’avantage de ne pas heurter les quelque dix millions d’électeurs qui se sont portés le 7 juillet sur le Nouveau Front Populaire. Il a toujours refusé de s’allier à Jean-Luc Mélenchon, un repoussoir à ses yeux comme à ceux de la plupart de la classe politique et des Français. Enfin, quoique marqué à gauche, il n’est pas rejeté par la droite.

Reste à savoir ce qu’en pense Emmanuel Macron. Il garde pour l’instant le silence, se laissant jusqu’au dernier instant une marge liberté…et donc la possibilité de sortir un lapin de son chapeau, comme il en a le secret. Mais Jupiter a-t-il encore les moyens de nous étonner ?

Valérie Lecasble

Editorialiste politique