Rassemblement national : la culture, tendance flou
Quelle est la politique culturelle du Rassemblement national? D’abord le patrimoine, ensuite le patrimoine et surtout le patrimoine. Pour le reste, chut!…
A plusieurs reprises ces dernières semaines, à Paris, à Perpignan ou Marseille, le Rassemblement national a soudain fait parler de lui à propos de culture. En mars, la députée RN du Pas-de-Calais, Caroline Parmentier alerte sur twitter à propos du tableau de Miriam Cahn exposé au Palais de Tokyo le qualifiant « d’incitation et de clin d’œil à tous les pédo-criminels et les agresseurs d’enfants ».
Dimanche 7 mai, un ancien élu local FN, âgé de 80 ans, dégrade l’œuvre en la maculant de de peinture bordeaux. Le RN parle d’un geste résumé à un « comportement individuel ».
Réservé ces derniers temps à des activistes environnementaux, le geste a opportunément rappelé l’extrême-droite à nos bons souvenirs.
Réaction de Rima Abdul Malak, ministre de la culture : « c’est très clairement de la censure de la part du Rassemblement national et de tous ceux qui ont tenté de faire décrocher cette œuvre ».
Toute la force du RN est…dans le non-dit
De son côté, Franck Allisio, député RN des Bouches du Rhône, signe une tribune dans Valeurs actuelles : « Le RN ennemi de la culture, un mythe entretenu ».
Franck Allisio pointe le fait que le RN s’est opposé à la réduction des budgets du festival d’Avignon, de la Friche de mai, du festival international d’art lyrique d’Aix ou des rencontres de la photographie d’Arles. Et il insiste sur le projet de favoriser un « maillage culturel du territoire et un accès de tous à la culture ». Là-dessus, tout le monde est d’accord. Oui, mais comment y parvenir ? Le député n’en souffle pas un mot. Toute la force du RN est…dans le non-dit.
Au fait, qui est chargé officiellement de la culture au RN ? Mystère. Seul, Sébastien Chenu, député du Nord devenu vice-président du RN et vice-président de l’Assemblée Nationale – fait office de conseiller en la matière auprès de Marine Le Pen.
La culture ? Elle est partout. Suffit de l’étaler…
Pendant la campagne électorale, celle-ci s’est contenté de répéter que « les membres de la culture n’ont pas de raison de s’inquiéter ». Ouf ! On respire. Marine le Pen a d’ailleurs mis au point avec son équipe, un concept révolutionnaire : nul besoin de programme pour la culture, puisque, c’est bien connu, la culture est partout. Il suffit de l’étaler.
Hervé Juvin, essayiste et membre du RN, a enfoncé le clou : « Politique culturelle, ça fait étatiste, autoritaire ». L’ombre des Soviets rôde… Mais on touchera pas au Pass culture ni au régime des intermittents du spectacle. Promis ! Et après ?
Sur le site du RN, le programme politique tient en 17 livrets thématiques. Sur la culture ? Rien. A l’extrême-droite, la culture est d’abord une affaire de patrimoine forcément national qui « tient une place majeure dans le redressement moral du pays » et représente « un facteur de cohésion sociale ». Concrètement, il s’agit de « mettre un terme aux atteintes portées à notre héritage culturel, et que la Nation se retrouve dans les lieux, paysages et les monuments où elle s’est formée». Retour à Alésia.
Ambition : développer de grandes productions comme… la série Napoléon de Christian Clavier
Patrimoine encore, le RN prévoit ainsi la mise en place d’une politique nationale financée par une refonte de la fiscalité avec, pour mesure phare, un service national du patrimoine sur la base du volontariat pour les 18 – 24 ans. A cela, il faut rajouter la défense de la voix de la France et de la culture française, la privatisation de l’audiovisuel public – sœur France Tv, ne vois-tu rien venir ? – et de nouveaux moyens donnés au cinéma français pour développer de grandes productions comme… la série Napoléon de Christian Clavier. Un modèle.
Une fois Marine Le Pen au pouvoir, les choses risquent pourtant de changer…
On a beau fouiller, au-delà d’une promotion style Relais et Châteaux, difficile de trouver au RN un véritable programme culturel. Une fois Marine Le Pen arrivée au pouvoir, les choses risquent pourtant de changer. De l’autre côté des Alpes, Georgia Meloni montre le chemin en reprennant la culture en mains.
A tel point que le patron de la RAI, Carlos Fuortes a démissionné pour protester contre l’ampleur des pressions politiques, tandis qu’une nouvelle loi opportune, portant sur la limite d’âge, va permettre d’acter le départ de plusieurs directeurs de grandes salles d’opéra, à Milan comme à Naples.
Le flou n’a qu’un temps.