Renaissance, parti mort-né

par Paul Nessim |  publié le 15/11/2024

Les macronistes sont-ils des centristes ? Des sociaux-démocrates prêts à s’allier à la droite ? Ou de simples opportunistes ?

Emmanuel Macron au Collège de France à Paris, le 13 novembre 2024. (Photo de Teresa Suarez / POOL / AFP)

En marche, La République en marche, Renaissance, Ensemble pour la République… Le parti présidentiel n’existe que depuis 2016 et a déjà changé de nom quatre fois. Il est probable qu’un nouveau changement advienne afin de marquer la rupture post-dissolution. Cela en dit long sur une organisation qui cherche encore son identité politique, malgré sept années d’existence.

Le problème est existentiel puisque – les caciques le disent eux-mêmes – personne ne sait où le parti va, ni ce qu’il doit proposer. Le projet initial, révolutionnaire selon Macron, consistait à se fier à son instinct et ses décisions et surtout pas à penser, proposer ou contester. C’est l’esprit de mise au pas des députés qui a, plus qu’autre chose, tué dans l’œuf le projet macroniste.

A un tournant de son existence, le parti fait face à plusieurs problèmes : 

  • Les militants disparaissent, faute de stratégie et de cap. Ils étaient plusieurs milliers entre 2017 et 2022 et ne sont plus que 8 500 adhérents à ce jour. 
  • Les députés fuient également. En juillet 2024, ils sont revenus à 101. Trois mois plus tard, ils ne sont que 94 et, surtout, s’estiment être des survivants, affranchis des ordres des chefs. Le « en même temps » a fait son temps. 
  • Enfin, militants et élus cherchent à se détacher de l’image du président et pensent à miser sur un nouveau candidat pour 2027, en espérant que celui-ci sera victorieux. 

Ces dernières semaines, Elisabeth Borne et Gabriel Attal se sont mis d’accord. Il devient chef, garde la main sur la trésorerie et continue son opération séduction auprès de militants acquis. 

Borne, elle, obtient un abstrait « conseil national » en lot de consolation et ne peut que constater son impuissance. C’est d’autant plus regrettable qu’elle avait fait un constat lucide : le parti est un vase creux, sans colonne vertébrale idéologique. Tout est à construire puisque rien ne l’a été. Mais, elle a fait face à un impensé sévissant en macronie : ne pas être un vrai politique, à l’ancienne, est rédhibitoire. Borne a privilégié une réforme du parti par les idées, alors qu’Attal a décidé de miser sur la politique à l’ancienne, inspiré en cela par son mentor de président. 

De tout cela, un problème ressort :  les macronistes évitent encore le débat et ce n’est pas possible dans une organisation politique saine. Rappelons qu’en 2019, il n’y avait déjà pas eu de débat pour désigner le chef. Stéphane Séjourné, par le fait du prince, avait été nommé. 

Ce parti qui, pourtant, se voulait révolutionnaire dans ses pratiques, esquive le moindre obstacle qui pourrait créer un début de soupçon de division en interne. 

On constate que ce phénomène est récurrent dans les partis politiques. Le RN adoube selon la proximité avec le clan Le Pen. LFI est dirigée de façon clanique, en fonction de la fidélité absolue à Mélenchon. Même le MoDem, parti centriste faisant de la démocratie son point cardinal, ne présente aucun candidat pour débattre face à Bayrou, alors qu’il serait sain de pouvoir l’affronter sur le projet et les idées. En mars 2024, le leader centriste avait été seul candidat en lice au congrès de son parti et avait remporté 90% des voix. 

Renaissance-EPR est dans une situation analogue à celle du PS et de LR en 2017, qui étaient des partis affaiblis par les défaites électorales, dont les adhérents s’évaporaient et les leaders étaient inaudibles. 

A son tour, le parti présidentiel peut disparaitre si un élan n’est pas trouvé et que tout est mis au service exclusif de Gabriel Attal. Ce serait éminemment symbolique et confirmerait définitivement que le macronisme n’était qu’une parenthèse de notre histoire politique.

Paul Nessim