Robert Badinter : un «mensch» 

par Bernard Attali |  publié le 09/02/2024

Robert Badinter était plus qu’un immense juriste, c’était une conscience morale. Victime de l’horreur de la Shoah dans son enfance, il fut toute sa vie le héraut des droits de l’Homme. Hommage

L'ancien ministre français de la Justice Robert Badinter dans son bureau à Paris, le 19 avril 2018- Photo JOEL SAGET / AFP

Fils d’immigrés juifs moldaves né en 1928, il devait beaucoup à l’école de la République et il lui donna beaucoup en retour. Contrairement à tant d’autres, il n’est pas entré en politique pour faire carrière, mais pour défendre les idées qu’il pensait justes. Devenu ministre de la Justice de la gauche, il a réellement « changé la vie ». Non seulement en supprimant la peine de mort, mais aussi les tribunaux militaires, la Cour de sûreté de l’État et en dépénalisant l’homosexualité. C’était l’homme de multiples combats, aussi bien en faveur des Tibétains que contre le racisme et l’antisémitisme. Il faisait partie de ceux pour qui les lumières ne sauraient s’éteindre. Jamais.

L’avoir connu m’a grandi. Robert Badinter était d’une immense générosité de cœur. Comme beaucoup d’autres, à chaque fois que j’ai rencontré un problème de conscience dans ma vie, c’est vers Robert Badinter que je me suis tourné. Impossible d’oublier son élégance. Il y a des décennies de cela, je n’étais pas grand-chose et il avait accepté de me voir rue du Faubourg Saint-Honoré, dans son cabinet d’avocat. Cette conversation éclaira ma route.

Pour ceux qui affectionnent le yiddish, il était ce qu’on appelle un « mensch ». Il y a des moments de deuil où l’on aimerait croire que le disparu n’est pas vraiment parti. Et pouvoir dire avec les poètes : « Il est juste de l’autre côté du chemin ».

Bernard Attali

Editorialiste