Royal-Hanouna : le pacte sans scrupules
Qu’importe le flacon… Pour Ségolène Royal, l’important, c’est d’être vue. Quitte à conforter le plus controversé des animateurs télé
La méthode est infaillible : une émission sur le silence de l’inceste impose le silence aux commentateurs. Dans « Touche pas à mon poste », sur C8, Cyril Hanouna reçoit Ségolène Royal, promue commentatrice attitrée.
L’ancienne candidate à la présidence de la République de 2007 vient expliquer les « clés » du problème, appuyée par le témoignage émouvant de l’actrice Emmanuelle Béart, qui a vécu le drame dans sa chair. Qui oserait s’élever contre une émission qui consacre du temps à un problème dévastateur ? Respectable, non ?
Mais derrière, ou plutôt devant, comme toujours, il y a Cyril Hanouna, présentateur de l’émission phare de C8, chaîne du groupe de Vincent Bolloré. Un bateleur vicelard, sans panache, mais efficace et prêt à toutes les provocations pour garder son audience de 900 000 téléspectateurs.
On l’a vu insulter l’un, se colleter avec l’autre, enchaîner les énormités. Au point que l’Arcom (l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique) l’a condamné à une amende de 300 000 euros pour avoir injurié Anne Hidalgo et 3,5 millions d’euros – record battu – pour ses insultes contre le pitoyable député LFI Louis Boyard, lui-même ancien employé du show.
Que vient faire Ségolène Royal dans cette galère ? Sinon offrir, contre un peu d’argent et beaucoup de visibilité, un label de sérieux à un méchant clown. Une seule explication : l’ego en béton armé de l’ancienne candidate à la présidentielle de 2007 ne s’est jamais remis de quitter la lumière des projecteurs.
Pour ressortir de l’ombre, elle a tout essayé : les livres façon philo (« Refusez la cruauté du monde ! Le temps d’aimer est venu »), les coups de gueule malvenus quand elle remet en cause la véracité du massacre de Boutcha par les Russes en Ukraine, les coups politiques quand elle accepte la proposition – éphémère – de Jean-Luc Mélenchon de mener la liste des Européennes de LFI, sur une ligne politique différente de la sienne.
Je me souviens de l’enterrement, dans la banlieue de Pointe-à-Pitre, d’un indépendantiste tué lors d’une manifestation. À la sortie de la messe, pendant que la tête du cortège cheminait derrière le corbillard, Ségolène marchait en queue, en faisant de grands gestes et d’immenses sourires aux personnes qui lui faisaient le bonheur de la reconnaître. Être, pour elle, c’est être vue.
Hanouna, qui a déjà accroché à son tableau de chasse Marlène Schiappa, ex-ministre, Louis Boyard et Raquel Garrido, peut se frotter les mains. L’alliance de la politique et du cirque, façon média Berlusconi, est un tout petit pas pour l’ex-candidate, mais un grand pas pour le populisme.