Sarkozy : la vie rêvée de Nicolas

par Valérie Lecasble |  publié le 03/09/2023

Dans sa dernière production, l’ancien président de la République ripoline son image en racontant sans talent mais par le menu  le quotidien de sa vie à l’Élysée. Si près de lui et si loin du réel…

Nicolas Sarkozy dédicace son livre à La Baule - Photo Laetitia Notarianni / Hans Lucas

C’est plus fort que lui. Il a un tel besoin de reconnaissance et aime tant parler de lui que quand il quitte le pouvoir, il lui faut encore se raconter. Deux livres en 2016, quatre autres depuis 2019. Un livre chaque année.

Est-ce pour donner sa vision, montrer un chemin pour la France, partager des analyses utiles et pertinentes, voire imprimer ses idées dans le débat politique ? Vous n’y êtes pas !

Il s’agit surtout de se mettre en scène, vanter son parcours, justifier ses décisions, bref, écrire le roman de sa propre action et de son bilan.

Nicolas Sarkozy s’est mis à raconter sa vie pendant son exil au Cap Nègre pour cause de confinement. Une description minutieuse, quotidienne et plutôt ennuyeuse de tout ce qui lui est arrivé pendant les années où il était président de la République, à l’acmé de sa vie.

Publié dès 2020, « Le Temps des Tempêtes » fut le premier tome de la trilogie de ses mémoires à l’Élysée, depuis le jour de son élection en mai 2007 jusqu’à la grande crise financière de 2008.

Voici donc le tome deux, « Le Temps des Combats », qui relate les trois années suivantes, de janvier 2009 à novembre 2011. Un pavé de chacun 527 pages rédigées de façon chronologique – surtout ne rien oublier ! – à la première personne du singulier, dans un style qui se veut simple et accessible, sans aucun chapitre ni structure.  

Le sujet ? Lui-même, ce qu’il fait et ce qu’il pense, de lui et des autres. Du Sarkozy par Sarkozy sur Sarkozy.

Pour illustrer ses propos, il publie des photos. En Une et en dernière de couverture, les images officielles d’Elodie Grégoire, sa photographe attitrée, montrent un Président de la République sous les ors de l’Élysée ou assis dans un hélicoptère proche de Carla Bruni. A l’intérieur, d’autres photos plus personnelles : Sarko à ski, à dos d’âne, avec sa mère, en compagnie de ses fils, le plus jeune Louis ou les aînés Jean et Pierre, ou en déplacement en Outremer, en Angleterre, en Allemagne, aux États-Unis, en Afrique, au Brésil.

Avec une mention spéciale pour la Libye « sans doute l’un de mes voyages les plus émouvants parmi ma vie de Président ». Les Libyens applaudiront, eux qui ont vu grâce au président ému leur pays sombrer dans le chaos. Peut-être aussi une forme d’échappatoire à la demande du Parquet National Financier (PNF) de renvoyer en correctionnelle le financement par la Libye de sa campagne présidentielle de 2007 ?

Dans sa galerie de portraits, le petit président n’oublie pas de vanter ses rencontres avec les grands, Barack Obama, le Prince Charles qui deviendra Roi, le pape, les dirigeants du G20 avec un coup de cœur pour son « amie » Angela Merkel. Une vraie saga pour un collector de Gala.

Faut-il avoir un égo surdimensionné ou une immense fragilité émotionnelle pour consacrer ainsi plus de 1000 pages à sa vie, son œuvre !  Il n’est – jamais – question de vision d’avenir, d’idéologie, ni même de message politique.

Sauf quand il cède à l’envie de régler des comptes anciens : « Marine Le Pen devrait reconnaître qu’elle porte une lourde responsabilité dans l’élection de François Hollande dont l’action fut calamiteuse. Elle a à l’époque appelé à voter contre moi donc pour lui. Le bilan de ce dernier est en conséquence le sien ».

À son crédit, une naïveté parfois touchante : « J’étais impatient de monter pour la première fois à bord du porte-avions Charles de Gaulle, même si je me méfiais de mon enthousiasme de chef des armées ». Oui, c’est beau un porte-avions, c’est grand la Maison-Blanche, c’est cher une Rolex, bien mieux qu’un bracelet électronique… On a parfois l’impression de suivre un ado devenu chef d’État et qui n’en revient pas de l’être.

Mille pages sans un mot sur les multiples poursuites judiciaires dont il est aujourd’hui l’objet ?  Qu’importe !  La presse quasi unanime lui livre sur un plateau une promotion en or massif où on oublie tout – Reviens Sarko, tout est pardonné ! »- même si , parfois, on rappelle à propos de l’Ukraine toute l’indulgence de Nicolas pour la grande Russie de Poutine.  

Allez vite ! Une photo avec Vladimir !

Pour un troisième tome de la vie rêvée de Nicolas…

Valérie Lecasble

Editorialiste politique