Semaine de Pâques à Jérusalem (4)
Mardi 18 avril. Jérusalem. Schmuel Gogol, l’homme à l’harmonica et Dov Forman, l’influenceur vedette
Vingt ans, brun, le visage sage et souriant, Dov Forman ressemble aux étudiants de son âge. Il n’est pourtant pas un jeune comme les autres. Tandis qu’Israël commémore la Shoah et le quatre-vingtième anniversaire de l’insurrection du Ghetto de Varsovie, il est au camp de Majdanek d’où il enregistre des vidéos pour Tik Tok. Son compte » » affiche 2,1 millions d’abonnés.
Il s’est fait connaître durant le Covid sur Twitter – suivi par plus de 70 millions de personnes -en racontant l’histoire de son arrière-grand-mère, Lily, survivante d’Auschwitz. Sur twitch également, il est devenu un influenceur de la mémoire de la Shoah.
Reçu par le Président Herzog, par le roi d’Angleterre, sollicité par les Nations Unies, il collabore à la fondation créée par Steven Spielberg. Avec Lily, il a publié un livre, best-seller distingué par le New York Times. Les influenceurs vont-ils éviter que le passé ne tombe dans l’oubli ?
Autre temps, autre dispositif du souvenir. Le musée Yad Vashem a créé une vallée des communautés juives disparues. Entre les hautes parois en pierre qui serpentent comme un canyon, le visiteur circule d’un pays à l’autre entre les noms des villes et des shtetls (1) d’où les juifs ont été éliminés.
L’Ukraine figure en bonne place : Kiev, Odessa, Uman, Marioupol. Les époques se chevauchent, les guerres se confondent, les destructions se superposent. Sur une estrade, des enfants jouent de l’harmonica en mémoire de Schmuel Gogol, le garçon qui, à Auschwitz, échangea sa nourriture contre l’instrument qui lui avait été confisqué.
Surpris par un nazi, il fut contraint de jouer dans l’orchestre du camp face au spectacle des déportés conduits à la chambre à gaz. En voyant disparaître plusieurs membres de sa propre famille.
Schmuel Gogol survécut et il devint un des plus grands joueurs d’harmonica au monde. En 1993, de retour au camp avec Itzhak Rabin, il rejoua les mélodies qu’il avait interprétées lorsqu’il était prisonnier. Un mois plus tard, il mourrait.
(1) Terme yiddish pour les petites villes avec des populations juives majoritairement ashkénazes qui existait en Europe de l’Est avant l’Holocauste
