Socialisme français : fantôme aujourd’hui, zombie demain ?
En se fondant dans la Nupes sans faire valoir son identité, le PS mène une stratégie suicidaire
Par la voix de Pierre Jouvet, secrétaire national, le Parti socialiste annonce dans le Journal du Dimanche qu’il envisage une liste commune de la Nupes pour les prochaines Européennes. Un an avant le scrutin, l’information n’est guère spectaculaire et les partis concernés ont le temps de changer trois fois d’avis. Elle traduit néanmoins la persistance d’une étrange stratégie : tenant depuis un an le rôle de fantôme, le PS postule désormais à l’emploi de zombie.
Éclipsés pendant la crise des retraites par les outrances de leurs partenaires insoumis, les socialistes hantent la scène nationale comme les spectres résignés d’un passé révolu. On entend quelquefois leur voix qui objecte timidement aux embardées protestataires des mélenchonistes, mais ce sont nuances inaudibles noyées par le vacarme ambiant.
Magnanime avec le parti insoumis qui ne cesse de faire cavalier seul, il n’a pas de mots assez durs pour les dissidents de la Nupes, pourtant socialistes de toujours. Un tweet veut tout dire : faisant référence au dernier quinquennat de gauche, dont ils étaient partie prenante, plusieurs chefs socialistes citent le président de l’époque, François Hollande, en ajoutant avec mépris : « celui dont le PS d’aujourd’hui ne se souvient plus du nom ».
Cet effacement de l’histoire commune, qui se veut d’une courageuse insolence, n’exprime rien d’autre que le vide. La critique des erreurs anciennes est certes légitime (à condition de rappeler aussi les succès). Le reniement total du passé débouche sur un présent inexistant et un avenir obscur.
En renonçant à présenter une liste au prochain scrutin, le PS saborde son propre vaisseau, qui donne déjà fortement de la bande. L’élection européenne est proportionnelle : chacun peut concourir sous ses propres couleurs sans dommage pour l’ensemble.
En fait, la tactique de la liste commune n’a qu’un seul but : préfigurer une candidature unique à la présidentielle suivante. Entre temps, noyé dans la Nupes, le PS n’a aucune chance d’incarner enfin la gauche réformiste qui fait gravement défaut au paysage politique français. Il s’enferme dans la simple protestation, sans aucune chance de gouverner.
À moins de considérer que la qualité de supplétif de la France insoumise suffit à son bonheur…