Sondage européennes : La Nupes est nue
Seule l’union, dit-on, peut sauver la gauche. Voici un sondage qui montre exactement le contraire…
Listes communes ou listes séparées pour les Européennes ? Entre les deux, le cœur de la gauche balance. Un sondage Harris Interactive du samedi 13 mai, commandé par les Verts, confirmé par une enquête de même nature publiée dimanche par le JDD, vient éclairer la discussion.
Trois scénarios ont été testés.
Dans le premier, les composantes de la Nupes font bande à part. EELV est crédité de 11 % des voix, devant le PS (10 %), LFI (9 %) et le PCF (3 %).
Dans le deuxième, la liste commune de la NUPES est créditée de 19 % des voix, avec des listes dissidentes socialiste (6 %) et écologiste (5 %).
Dans le dernier scénario, celui d’une liste unique sans dissidence, la NUPE est donnée à 23 %.
La leçon est claire : aux Européennes, la gauche gagne plus à l’autonomie qu’à l’union. Avec les listes séparées, elle remporte 33 % des voix ; avec une liste Nupes et des dissidents socialistes et écologistes, elle obtient au total 30 % des voix ; avec une liste unique sans dissidences, elle tombe à 23 %. Autrement dit, plus elle s’unit, moins elle remporte de voix (dix points de moins, ce qui n’est pas rien).
Les dirigeants de LFI pointent le fait d’une liste unique qui aurait le mérite de se rapprocher des listes Macron et Le Pen. C’est un argument fallacieux : le scrutin européen est proportionnel et non majoritaire, il n’y a pas de deuxième tour. Si bien qu’avec 33 % des voix, la gauche remporterait évidemment bien plus de sièges qu’avec une liste unique à 23 %. Il ne s’agit pas d’élire des députés en France, mais des parlementaires européens.
L’important, c’est le nombre d’élus dans l’arène européenne, où compte avant tout le rapport de force droites gauches : il est nettement meilleur avec plusieurs listes qu’avec une seule. Telle est la réalité politique révélée par l’enquête : il est probable que la présence de LFI sur une liste unique rebute une partie des électeurs de gauche ; dans ce genre de scrutin, la Nupes est un handicap, non un atout.
La pression de LFI a une autre explication que le simple désir d’unité : dans le cas de listes séparées, le parti mélenchonien obtient 9 % des voix, contre 10 et 11 % pour les Verts et le PS. Horreur sondagière ! Alors qu’elle domine aujourd’hui de la tête et des épaules la coalition, la France insoumise se retrouve en troisième position dans le sondage Harris (et à égalité dans celui du JDD).
Si tel était le score final aux européennes, c’en serait évidemment terminé de l’hégémonie des mélenchonistes sur la gauche, issue des scores de 2022 à la présidentielle et aux législatives. Socialistes et écologistes seraient fondés à renégocier à leur avantage les termes d’un futur accord pour 2027, ce dont la direction de LFI ne veut à aucun prix. D’où son agressive campagne en faveur du maintien d’une coalition où leurs partenaires jouent les supplétifs.
Les Verts en ont tiré les conséquences : ils prévoient de présenter une liste EELV. Étrangement, les socialistes hésitent. Entre le risque d’une existence autonome et l’effacement derrière LFI, ils n’ont toujours pas choisi. L’affaire prend ainsi un tour shakespearien : pour le PS, être ou ne pas être, telle est la question…