Trump et l’Afrique
Lors de son premier mandat, Donald Trump ne s’est guère intéressé à l’Afrique, qu’il a dans l’ensemble méprisée. En sera-t-il autrement pour le second ?
Assez logiquement, l’expérience passée de Donald Trump lors de son premier mandat ne le prêtait guère à s’intéresser à l’Afrique. Ses affaires étaient tout entièrement tournées vers un monde très occidental, qu’il s’agisse de l’immobilier ou des médias. Il épousait donc tous les préjugés de son propre univers.
Son slogan fétiche « Make America great again » (MAGA) ne pouvait également que renforcer son occidentalo-centrisme ou sa fascination pour les régimes autoritaires russes ou asiatiques.
De là son vocabulaire fleuri et méprisant à propos des pays africains, notamment l’Afrique subsaharienne.
De là, le constat d’une sérieuse perte d’influence sur le continent, contrairement au regain enregistré sous le mandat de son prédécesseur Obama, ou la reprise initiée par son successeur Biden.
Perte d’influence, mais aussi perte d’opportunités économiques ou de contrats importants. Le panorama politique et économique de l’Afrique a en outre beaucoup changé en quatre ans ; entre la multiplication des coups d’État et des confits localisés, la perte générale d’influence de l’Europe, notamment la France, la montée en force de la Russie et la confirmation de la puissance financière de la Chine. La position des États-Unis apparait donc encore très incertaine.
Conformément à la doctrine MAGA, Trump sera surtout obsédé par la recherche des intérêts américains dans sa stratégie internationale. Il peut déjà compter sur quelques alliés fidèles, dont le Maroc. Le roi Mohamed VI se souvient, en effet, de la décision « mémorable » de Trump en 2020, de reconnaître la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental. Pour Trump, le roi du Maroc peut être un bon relais dans une politique africaine plus offensive, notamment pour la compétition avec la Chine sinon la Russie.
Trois sujets peuvent aider à questionner la stratégie future.
Le premier concerne le sort des troupes américaines en Afrique. Donald Trump a plutôt professé durant sa campagne sa volonté de déployer le moins possible de troupes à l’extérieur des États-Unis. Mais qu’en fera-il, étant donné par ailleurs ses tentations autoritaristes voire fascisantes ?
Le deuxième sujet est celui des gros marchés à caractère stratégique, où la compétition avec la Chine peut être particulièrement significative d’un rééquilibrage des forces. On pense ici à la construction du corridor ferroviaire reliant Lobito en Angola à Dar-el-Salam en Tanzanie. Il s’agit en effet, non seulement du contrôle d’une voie ferrée traversant de part en part l’Afrique australe, mais surtout de l’accès aux riches ressources minières du Katanga au sud de la RDC et de la Zambie où l’on trouve tous les matériaux stratégiques pour la transition énergétique. Un énorme marché dont la Chine possède un quasi-monopole.
Une entreprise américaine a déjà gagné, contre toute attente, le marché de l’exploitation de la ligne construite par les Chinois jusqu’aux confins de la RDC. Mais il reste à construire la suite à travers la RDC, la Zambie et la Tanzanie face à des Chinois déjà en place.
Certes Trump n’est pas connu comme un farouche partisan de la transition énergétique, mais l’opportunité d’une telle double victoire à la fois politique et économique sur les Chinois pourrait le motiver fortement.
Il reste enfin un point d’interrogation sur le devenir de l’AGOA (African Growth and Opportunity Act), cet accord de quasi-libre échange entre les États-Unis et l’Afrique. Le dernier Sommet relatif à cet accord, tenu il y a deux ans à Johannesburg, avait conclu à son renouvellement au-delà de 2025 et à sa possible extension aux matériaux stratégiques à laquelle de nombreux milieux d’affaires américains sont favorables.