Trumpisme et nazisme
On pensait jusqu’à présent que toute comparaison entre trumpisme et fascisme était outrancière et historiquement fausse. Voici qu’on se prend à douter…

Encore un salut nazi dans le courant trumpiste. Même Jordan Bardella – sincère répulsion ou réflexe politique ? – a trouvé que cela allait trop loin. Steve Bannon idéologue et publiciste du national-populisme, à la fin de son discours devant la grand-messe des « conservateurs » américains, a en effet tendu le bras à la manière des adeptes du Führer, comme l’avait fait Elon Musk avant lui.
L’utilisation de ce salut – rituellement suivie d’un démenti hypocrite – est devenu un signe de reconnaissance parmi les populistes d’extrême-droite, une provocation dont ils s’amusent en prévoyant, comme on dit sur CNews, « l’indignation des bien-pensants ». C’est-à-dire des partisans de la démocratie, pour lesquels ils n’ont que mépris.
Est-on si sûr, au vrai, qu’il s’agisse d’une provocation ? Jusqu’ici, on s’était gardé dans cette lettre de toute assimilation des populistes aux fascistes. Mais à la longue, on finit par se poser la question. Certes, les trumpistes ne défilent pas en chemise brune dans les rues, n’ouvrent pas de camp de concentration pour enfermer leurs ennemis, ne professent pas la haine des Juifs et n’organisent pas de « nuit de cristal ». Mais par certains signes qui ne trompent pas, ils se rapprochent de plus en plus des partis fascistes des années trente.
La liste est éclairante : Trump n’a pas hésité à dire qu’il serait un dictateur. « Pour une journée », a-t-il ajouté, mais depuis qu’il est au pouvoir, il agit par décret sans consulter le moins du monde le Congrès élu. Dans son discours clos sur un salut nazi, Bannon a demandé qu’on viole la constitution pour permettre à Trump d’effectuer un troisième mandat, tel Hitler et Mussolini, arrivés au pouvoir par un mécanisme légal, mais qui ont ensuite prolongé indéfiniment leur mandat.
Trump a gracié ses partisans coupables d’assaut armé contre le Capitole à la manière des SA. Il poursuit de sa vindicte les juges, les journalistes, les fonctionnaires qui se sont opposés à lui, comme l’ont fait les nazis. Il a rouvert le camp de Guantanamo, non pour y enfermer des terroristes, mais les sans-papiers qu’il pourchasse avec son armée et sa police. Il menace d’annexer deux pays voisins, le Canada et le Groenland, au besoin par la force. Son vice-président J.D. Vance parle comme un gauleiter aux Européens et fait l’éloge de l’AfD, parti fondé par des pronazis, tandis que son patron ourdit avec Poutine l’abandon de l’Ukraine, comme Hitler avait réglé le sort de la Tchécoslovaquie.
Comparaison excessive ? Analogie partisane ? Voire. Les trumpistes pratiquent à leur manière le culte du chef, exècrent l’état de droit et font savoir ostensiblement qu’ils ne respectent que la force. Tout cela, bien sûr, est orné des oripeaux de la culture de la télévision et des réseaux sociaux, ce qui rassure les naïfs. Mais sur le fond ? « Fight ! Fight ! Fight ! », a lancé Trump juste après l’attentat dirigé contre lui. Des mots repris par Bannon, qui en a fait l’emblème du trumpisme. « Fight », c’est-à-dire combat. En allemand : « Kampf ».