Vers un échec annoncé ?

par Jean-Paul de Gaudemar |  publié le 21/11/2024

La COP28 s’était terminée par une déclaration visant la sortie progressive des énergies fossiles. La COP29, tenue à Bakou, pays de l’or noir « don de Dieu », peut-elle poursuivre dans cette voie ?

Devant l'entrée de la COP29, à Baku (Azerbaïdjan), le 10 novembre 2024 (Photo de Alexander Nemenov / AFP)

On évalue le coût de l’adaptation de l’économie mondiale au changement climatique au chiffre faramineux de 6.500 milliards de dollars par an. En comparaison, le PIB mondial est de l’ordre de 105.000 milliards de dollars. Cet effort à effectuer représenterait ainsi 6% par an du PIB mondial et l’équivalent de deux fois le PIB de la France. 

De tels montants sont-ils susceptibles de recevoir un agrément international dans une telle COP ? Une COP présidée par un dictateur célébrant les hydrocarbures comme un « don de Dieu », par ailleurs désertée par la plupart des chefs des plus grandes puissances d’Amérique du Nord, d’Europe ou du Golfe, mais à l’inverse fort garnie du côté des pays en voie de développement demandeurs des financements espérés ainsi que d’un éventail impressionnant de lobbyistes des hydrocarbures.

La majeure partie des besoins estimés concerne les pays développés. Sur les 6.500 milliards de dollars par an, les pays en voie de développement en réclament 1.300, soit 20%. Les pays africains rassemblés en septembre à Abidjan étaient parvenus à une estimation du même ordre espérant approcher une enveloppe de 1.000 milliards. 

D’une COP à l’autre, on a changé d’échelle. Pour les pays en développement, on est ainsi passé de 100 à plus d’un millier de milliards de dollars. C’est là sans doute le signe d’une approche plus fine des phénomènes en cause, mais aussi de la prise de conscience d’une plus grande urgence, tant les seuils d’alerte du changement climatique sont d’ores et déjà dépassés.

Pourtant, on ne peut s’empêcher de penser que dans un tel contexte international, ces espoirs sont vains. D’autant que la bataille se poursuit pour identifier la liste des pays censés être les payeurs. Or, depuis celle établie en 1992, l’économie mondiale s’est transformée. La Chine en particulier est devenue une grande puissance et le plus gros pollueur ! Pour autant, ses dirigeants considèrent qu’il ne peut être question de participer à de telles contributions. 

La bataille porte donc à la fois sur les montants estimés, mais aussi sur les pays qui doivent en assumer la charge. La position des pays africains par rapport à la Chine est ainsi ambigüe, tant ils craignent de froisser ce grand voisin asiatique dont ils sont si dépendants financièrement.

Deux autres sujets au moins préoccupent les pays en voie de développement. Le premier est celui de la nature des financements. Les pays en développement ne peuvent compter que très partiellement sur des investissements du secteur privé tant est grande l’aversion du risque chez ce dernier. L’essentiel de leurs besoins ne peut donc être couvert que par l’aide publique bi- ou multilatérale, laquelle privilégie toujours les prêts aux dons ou subventions. Or le nombre de pays bénéficiaires endettés ou surendettés va croissant, risquant ainsi de transformer la solidarité internationale en fardeau financier supplémentaire. 

Le second sujet concerne la répartition de tels Fonds. Le rapport de l’OCDE a montré – quand fut enfin atteint le seuil des 100 milliards de dollars – que la répartition des aides octroyées en 2022 n’était pas toujours proportionnelle à la réalité des besoins. Les pays à revenu intermédiaire ont ainsi été nettement privilégiés jusqu’ici, une phase transitoire difficilement tolérable à terme. C’est d’ailleurs depuis longtemps un argument des pays en développement (et de la Chine !) : la crainte que les institutions internationales, notamment la Banque Mondiale qui héberge le Fonds climatique, ne veillent pas suffisamment à une répartition plus juste.

Jean-Paul de Gaudemar

Chronique Société - Education- Afrique