Vive la violence ?
En réponse à la dissolution d’une nébuleuse écologiste accusée de « terrorisme », les justifications de la violence se multiplient dans les cercles militants. Inquiétude…
Comme prévu (voir l’édito d’hier), la dissolution des « Soulèvements de la Terre » n’a fait qu’aggraver les choses. Cette organisation inorganisée comprend toutes sortes de groupes et groupuscules, dont certains sont violents et les autres non. Bien entendu, le caractère sommaire de la mesure permet aux plus radicaux de se camoufler derrière les autres et de crier à la répression.
Plutôt que cette punition collective, qui fait surtout plaisir aux syndicats de police et aux syndicats agricoles, il eût évidemment mieux valu poursuivre et condamner individuellement les auteurs de violence, ce que la plupart des Français auraient compris. Au lieu de cela, les radicaux réussissent à fédérer autour d’eux des partis ou des mouvements parfaitement légalistes, ce qui leur permet d’élargir leur influence.
Ainsi, avec l’aide du gouvernement, continue de se répandre à une vitesse inquiétante la justification de la violence par une tripotée de militants, de responsables ou d’élus, qui, manifestement, ne savent pas très bien de quoi ils parlent. Leur raisonnement repose en fait sur un sophisme, qui consiste à employer le même mot pour désigner des choses différentes. Ils mettent sur le même plan violence symbolique, sociale ou économique et violence physique. L’usage des premières par le pouvoir, ou par « les puissants », justifierait en retour celui de la seconde par les protestataires.
Or la violence physique – faut-il le rappeler ? – consiste à blesser, mutiler, brûler ou tuer des personnes. Il faut être bien inconséquent, ou très ignorant, pour considérer qu’il s’agit, dans une démocratie comme la France, d’actes légitimes, d’une réponse justifiée à la politique menée par un gouvernement élu, serait-elle jugée mauvaise. Veut-on vraiment engager le mouvement écologique sur cette voie, qui provoquera en retour une répression inévitable et incitera, au passage, l’opinion à se retourner contre les écologistes.
Les blacks blocs, vieux routiers de l’activisme violent, qui tendent décidément à faire école, ont-ils jamais obtenu une quelconque avancée sociale ou politique ? Oublie-t-on que cette apologie plus ou moins oblique de la violence traduit surtout l’incapacité des activistes à fédérer autour d’eux une majorité, à convaincre le public au-delà des cercles déjà convertis ?
On réplique que les moyens pacifiques n’ont rien donné et qu’il faut passer à des méthodes plus musclées. Question naïve : combien faudra-t-il de morts et de blessés pour obtenir des avancées satisfaisantes ?
À cela, les stratèges en chambre de la « violence légitime », tranquillement assis dans leur salon ou dans un studio de télévision, se gardent bien de répondre.