Xi Jin Ping ou l’art de la guerre avec l’Occident
Les récentes interventions diplomatiques du président Xi Jin permettent de bien lire la position chinoise
La Chine est un pays de symboles. Par son voyage à Paris, Xi Jin Ping a montré qu’il souhaitait conserver des relations avec les pays occidentaux qu’il fustige par ailleurs. La France de ce point de vue s’imposait. Premier pays à avoir reconnu la Chine populaire en 1964, elle est aussi puissance nucléaire et membre du conseil de sécurité, de l’ONU. Grand lecteur de Proust, Xi Jin Ping apprécie la culture, la littérature française. Mais il ne s’agit pas de cela, ni d’amitié, et il ne fallait rien attendre de plus concret de sa visite, ni de ses conversations avec le président Macron.
Ses intérêts sont ailleurs, chez ceux qui le soutiennent : la Serbie, la Hongrie, proches de la Russie, devenu pays vassal, dont il a reçu le président Poutine dès son retour à Pékin. Avec lui et tous les pays que l’on appelle curieusement ceux du sud global, il entend remettre en cause les valeurs démocratiques occidentales, créer les conditions d’un regroupement de pays qui s’opposent aux États-Unis, sans pour autant rompre avec l’Occident : voilà la ligne politique chinoise.
Dès 2013, nouvellement élu, secrétaire général du parti communiste, Xi Jin Ping avait clairement énoncé dans le document no 9 les sept périls auxquelles il fallait faire face, parmi lesquels : la démocratie constitutionnelle occidentale, les valeurs universelles des droits de l’homme, la société civile, la liberté de la presse(‘la relation entre le parti et les médias est celle du dirigeant et du dirigé ´), le libéralisme. On a peu prêté attention, en 2013, à ces déclarations, dans l’illusion d’un pays qui s’ouvrait au commerce avec les occidentaux et modernisait le pays à marche forcée. Avec Xi Jin Ping, l’idéologie a repris le pas sur l’économie. Tout est déjà en place dès sa prise de pouvoir.
L’épidémie de la COVID a créé les conditions d’une mise en œuvre de sa politique: brutale reprise en main du pays, y compris Hong Kong, contrôle social, durcissement des relations avec l’Occident. La guerre en Ukraine a été l’occasion de définir le contour des camps qui s’affrontent désormais : l’Occident démocratique d’un côté, les régimes autoritaires de l’autre. En 4 ans, le monde a radicalement changé.
La Chine a une autre notion du temps. Les dynasties se sont succédées depuis des milliers d’années. Les humiliations subies entre 1850 et 1949 ne sont pas oubliées. En 2049, la Chine fêtera le centième anniversaire de l’avènement de la République populaire, régime communiste révolutionnaire. À cette date, elle compte devenir la première puissance mondiale, avoir récupéré Taïwan, et proposer au reste du monde un modèle et des valeurs qui lui sont propres. Fin lettré, Xi Jin Ping a lu L’art de la guerre écrit à la fin du Ve siècle, par un général du roi de Wu: « L’art de la guerre, c’est de soumettre l’ennemi sans combat ».