Après la Nupes

par Laurent Joffrin |  publié le 11/10/2023

Que dire, à gauche, des déclarations outrageantes des chefs de la France insoumise, sinon qu’il est temps de s’émanciper de LFI et de bâtir une autre coalition ?

Laurent Joffrin

Comment l’esprit vient aux commentateurs de gauche… Il a donc fallu la scandaleuse prise de position de la France insoumise sur l’attaque terroriste menée par le Hamas pour que s’impose à leurs yeux ce que nous écrivons depuis un an : une union dominée par Jean-Luc Mélenchon envoie toute la gauche dans le mur.

En refusant de choisir entre l’agresseur et l’agressé, en évitant par toutes sortes de contorsions rhétoriques de qualifier de « terroriste » une organisation qui emploie les mêmes méthodes que les tueurs de Daesh ou d’Al Qaida, Jean-Luc Mélenchon a pris une position outrageante. Il a été désavoué par toute la gauche et par plusieurs de ses anciens lieutenants au sein même de LFI. Mais comme une grande partie de cette gauche continue de se référer à la moribonde Nupes, elle est touchée, elle aussi, par le discrédit qui frappe les Insoumis au sein de l’opinion démocratique. Comme lors des émeutes de juin, ou bien à propos des « violences policières », LFI contamine par son extrémisme la coalition tout entière. Ainsi que l’écrit enfin Le Monde, « il est plus que temps de s’affranchir de cette tutelle ».

Ce n’est plus Marine Le Pen qui fait peur, aux Français juifs et aux autres. C’est Jean-Luc Mélenchon.

D’autant que les désastreuses conséquences de cette inconséquence se font sentir bien au-delà. La position de LFI fait contraste avec celle du Rassemblement national, qui a évidemment condamné fermement les actes barbares du Hamas. Ainsi, en se distinguant par son extrémisme, Jean-Luc Mélenchon facilite une nouvelle fois la « normalisation » de Marine Le Pen, pourtant à la tête d’un parti longtemps marqué par l’antisémitisme et qui continue de frayer avec certains responsables de l’ultra-droite anti-juive. Elle a même été applaudie par une partie de la majorité à l’Assemblée. Désormais, on le voit dans toutes les enquêtes d’opinion, ce n’est plus elle qui fait peur, aux Français juifs et aux autres. C’est lui.

Aussi bien, il voudrait monter les communautés les unes contre les autres en trouvant au Hamas des justifications, qu’il ne s’y prendrait pas autrement. Telle est la marque de cette stratégie de la confrontation systématique qu’il applique avec obstination, sans aucune considération pour ses partenaires de la Nupes : elle ne cesse, au lieu de proposer une contre-projet crédible, d’attiser les tensions dans la société française.

La gauche démocratique commence à ouvrir les yeux. Elle dispose de trois ans pour adopter un programme et bâtir une autre coalition. Il est temps de s’y mettre.  

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Laurent Joffrin