Immigration : la droite perroquet

par Laurent Joffrin |  publié le 09/11/2023

En adoptant trois mesures anti-immigration au parfum xénophobe, le Sénat porte atteinte à l’identité française

Laurent Joffrin

Pauvre droite française, réduite à répéter servilement le discours du Rassemblement national… Le Sénat dominé par les élus LR restreint le droit du sol, supprime la régularisation des sans-papiers dans les « métiers en tension » et transforme l’Aide médicale d’État (AME) en Aide médicale d’urgence. Trois mesures destinées à réduire « l’appel d’air » produit par des dispositions jugées trop favorables aux étrangers ou à leurs enfants, ce qu’aucune étude sérieuse n’a jamais attesté. Trois mesures, surtout, contraires au bon sens et à l’esprit de la République.

Le droit du sol est une tradition ancestrale en France, qui remonte à François 1er et qui fut ratifiée par tous les régimes – la Royauté, la Révolution, l’Empire et enfin la République. Hostile à la conception ethnique de la nation, considérant que la nationalité ne dérive pas seulement du sang, mais aussi de l’éducation des enfants élevés par la République, la loi prévoit qu’on devient automatiquement français à sa majorité si l’on est né en France. La restreindre, c’est supposer que les enfants d’étrangers sont a priori suspects, qu’ils doivent démontrer d’emblée leur attachement à la nation. Un seul gouvernement avait adopté ce point de vue : celui du maréchal Pétain entre 1940 et 1944. 

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La régularisation des travailleurs sans papiers qui occupent un emploi depuis plusieurs années découle du bon sens : s’ils se sont intégrés dans le monde du travail en respectant les règles sociales, c’est qu’ils sont utiles. Pourquoi les maintenir indéfiniment dans un statut incertain où ils risquent l’expulsion à tout moment, alors que leur seul crime consiste à contribuer au fonctionnement de l’économie française ?

Réduire enfin les soins dispensés par le truchement de l’AME aux cas d’urgence, c’est laisser les pathologies moins graves sans soins et donc accroître in fine le nombre des urgences. Mesure franchement xénophobe dans son absurdité.

Alors que les vrais problèmes – la maîtrise des entrées, l’inapplication de la loi sur les obligations de quitter le territoire français pour ceux qui ne remplissent pas les conditions de l’asile, l’intégration insuffisante des nouveaux arrivants et leur mauvaise répartition sur le territoire – sont laissés dans l’ombre, au profit de mesures contraires aux traditions d’accueil de la République. La droite veut défendre l’identité française, dit-elle. Elle commence par y porter gravement atteinte.

Laurent Joffrin