La gauche ne peut pas gouverner seule

par Boris Enet |  publié le 11/07/2024

Cessons de brutaliser la société, acceptons le compromis. Agissons « pour » et non pas « contre ».

Boris Enet

Les dirigeants de la France Insoumise semblent miser sur une dangereuse stratégie de la tension : marche sur Matignon évoquée par Quatennens, communiqué sur le « détournement des institutions » par Emmanuel Macron. Les gauches responsables doivent lui préférer des solutions réparatrices, une stratégie réaliste et refuser cette folle impasse. Le tout dans la clarté, loin des conciliabules secrets et autres tête-à-tête sulfureux qui abîment gravement l’idée même de démocratie. Un surplus de crise politique et démocratique ne ferait que préparer une nouvelle montée de la marée brune. 

Cette France nous a fait si peur avant qu’un « splendide élan » entre les deux tours ne nous évite une descente vertigineuse dans les bas-fonds du pire. Nous avons remporté le 7 juillet une grande victoire… mais une victoire partielle, parce que le danger, endigué cette fois encore, demeure. La progression de la menace est indéniable depuis 2012, à chaque élection ou presque, quelle que soit la nature de celle-ci.

« Nous défendrons la République tous ensemble par-delà ce qui nous sépare »

Que notre midi, jadis qualifié de midi rouge, soit devenu un midi noir… Que la plupart des métropoles et des autres grandes villes soient encerclés par des gens qui ne veulent pas de bien ni aux libertés publiques ni à la démocratie… nous oblige à la lucidité sur d’où nous partons et sur ce qui nous attend. Point de méprise sur ce qu’il s’est passé les 9 juin, 30 juin et 7 juillet. L’explication rassurante sur l’expression de colères accumulées qui disparaitraient pour peu qu’on les entende ne résiste pas à l’analyse.

Face à cette menace existentielle, des millions de citoyens se sont levés, tranquillement mais fermement, pour dire avec leur bulletin de vote : nous ne voulons pas de votre régime illibéral. Nous défendrons la République tous ensemble par-delà ce qui nous sépare. Bien sûr, la gauche a pris toute sa place, la première, dans cette insurrection des esprits au nom des valeurs de la démocratie. Mais nous n’étions pas seuls, heureusement. Cette réalité politique au-delà des calculettes nous oblige non seulement formellement, mais surtout pratiquement. Ce sont toutes celles et ceux qui ont voté pour le front républicain qui ont gagné contre le RN et à tous, nous devons un égal respect dans la diversité des convictions partisanes.

Ceux qui ont proclamé le soir même contre l’évidence, « Nous avons gagné, nous avons un mandat pour agir immédiatement, pour appliquer le programme, tout le programme, rien que le programme » se trompent lourdement. Car, certes, les institutions le permettraient sur le papier mais en nous conduisant à coup sûr à un désastre. Brutaliser encore et toujours, rendre le climat politique de ce pays irrespirable, diviser la société n’a jamais été et ne sera jamais une ambition honorable. Laissons cela à Mélenchon et à la petite camarilla qui le conforte dans ses erreurs funestes.

Toute la série
1. La gauche ne peut pas gouverner seule
2. Une politique du possible
3. Changer la République

Boris Enet