La lente agonie de la République : Le dangereux mirage de la métropolisation (2)
Politique de la ville, service national, école, vie associative, police : les erreurs qui nous ont conduits où nous sommes. Par Philippe Dorthe *
Cette vision dépassée de l’organisation spatiale urbaine mène progressivement nos villes moyennes vers un monde « orwellien ».
À gauche comme à droite, la métropolisation, qui consiste pour les grandes villes à englober dans la même politique urbaine les communes avoisinantes, est souvent devenue symbole de puissance. Ce qui est certain, c’est que les promoteurs et autres rapaces du BTP ont rapidement trouvé dans cette vision du développement urbain une « pompe à fric » qui les fait rêver.
À l’heure où le système économique est en train de se fissurer, de se laminer, de frapper les plus modestes et de paupériser les classes moyennes qui vont venir grossir les rangs des classes insécurisées, on continue à développer une vision technocratique de la ville… Au lieu de revenir vers une vision plus humaniste qui nous manque depuis si longtemps.
Les programmes explosent dans tous les sens sans se soucier des infrastructures publiques qui viennent toujours après et particulièrement les écoles. Sans oublier le nombre de médecins généralistes qui ne correspond plus au nombre d’habitants, ce qui a pour effet de créer des déserts médicaux urbains. Les axes de circulations difficilement aménageables se thrombosent.
Puis la ville passe dans le surpoids, voire l’obésité morbide, et développe des pathologies urbaines graves, comme l’insécurité, le stress, les maladies psychiques.
Alors on gonfle les effectifs de la police municipale, on l’arme et on pose des caméras de surveillance tous les vingt mètres. Dans cette situation, je n’ai rien à redire sur ces décisions devenues souvent inévitables, mais il faut bien être conscient que leur efficacité est celle du paracétamol sur un staphylocoque doré. En fait, la ville est comme un corps humain dont tous les organes vitaux sont reliés et irrigués par un réseau sanguin ultra performant.
Quand on surcharge, c’est déjà trop tard.
Entre étalement urbain et concentration urbaine métropolitaine souvent outrancière, il y a une troisième voie : la multipolarité, intelligemment pensée, à progressivité et densité maîtrisée, associée à un réseau de transports en commun en site propre et à grande vitesse (TERGV) permettant de connecter ces pôles à dimension humaine avec efficacité.
Ce maillage territorial dense participerait à endiguer la désertification rurale. Ceci doit être lié à un programme de réindustrialisation vertueux basé sur la décarbonation, ce qui permettrait de travailler et de vivre au pays avec des temps de transports limités.
Loin de moi l’idée de supprimer les métropoles, mais cette vision plus harmonieuse de développer les territoires doit trouver des femmes et des hommes courageux qui ne craindront pas de réhabiliter le temps long.
Philippe Dorthe
* Conseiller régional et départemental honoraire (PS)