Si jeune et déjà vieux…

par Laurent Joffrin |  publié le 30/01/2024

Même si quelques mesures vont dans le bon sens, le discours de politique générale de Gabriel Attal, d’une facture fort classique, confirme surtout le glissement conservateur du macronisme.

Laurent Joffrin

D’un Premier ministre né en 1989, on attendait des nouveautés. Or la principale nouveauté, hormis son homosexualité, rappelée en conclusion pour exalter la modernité française, c’est que le Premier ministre… est jeune.

Pour le reste, son discours de politique générale fut, il faut bien le dire, d’un classicisme à toute épreuve. Mauvais ? Non : traditionnel. Celui d’un brillant sujet dans les rails, celui d’un gendre idéal bien mis et bien peigné, ou encore celui d’un premier de la classe à Stanislas. Une énumération de mesures disparates encadrée par quelques formules de communiquant, un appel à la confiance, la défense d’un bilan enjolivé, l’affirmation d’une volonté, ce qui est la moindre des choses quand on arrive à ce poste éminent.

Des mesures qui ne sont pas toutes critiquables, contrairement à ce qu’on entend d’une opposition qui a tort de s’opposer mécaniquement à tout. La réforme de la fin de vie, dotée d’un calendrier, va dans le bon sens, sans qu’on sache encore son extension ; la lutte contre la « smicardisation » est justifiée, même si on n’en connaît pas les modalités ; le service civique écologique peut être utile ; l’attention portée aux horaires des personnels chargés de l’entretien dans les entreprises ou les administrations est positive.

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Mais l’ensemble n’est pas à la hauteur de ce remaniement spectaculaire, étiré sur des semaines, symbolisé par la nomination d’un chef de gouvernement de 34 ans. Les concessions aux agriculteurs ne mettront pas fin à la crise et présagent d’un recul écologique. La lutte pour le climat reste en deçà de la main, sans effort sérieux de planification. Le combat contre la « bureaucratie » a été revendiqué par tous les gouvernements depuis des lustres. La réforme prévue de l’Aide médicale d’État demande examen attentif.

Sous des habits neufs, le macronisme poursuit son chemin, libéral en matière sociale, de manière à « fluidifier » le marché du travail, plutôt conservateur dans la plupart des domaines, avec un appel à l’autorité, au mérite, une restriction confirmée des droits des étrangers, et même une promesse de défendre une « identité française » fixe et immémoriale. Un casting inédit pour un programme déjà vu, une orientation de centre-droit qui louche vers les conservateurs. Un virage en ligne droite, en quelque sorte.

Laurent Joffrin