Sus à Glucksmann !
Une liste socialiste élargie dirigée par le député européen pourrait faire un bon score et changer la donne. La preuve : elle est déjà férocement attaquée par les Insoumis.
Sourde angoisse à LFI : et si l’hypothèse Glucksmann prenait corps ? Pour conjurer le péril, le tir de barrage se met en place. Floraison d’adjectifs sur les réseaux – opportuniste, atlantiste, sarkozyste, macroniste et, pire que tout, social-démocrate – papier dénonciateur dans Le Monde Diplo, allusions perfides et interrogations doucereuses, qui viennent compléter l’appel de Bompard à « se regrouper derrière le programme de la Nupes » et la proposition de réunion d’urgence après l’adoption du projet de loi Immigration, pour l’instant sans réponse des autres composantes de la gauche.
C’est un fait que Raphaël Glucksmann n’a pas commencé sa carrière publique à gauche. Libéral, un temps proche du sarkozysme, le jeune homme n’a pas le passé d’un militant socialiste ou écologiste. Mais il a fait amende honorable, rejoint la gauche socialiste, combattu comme militant des Droits de l’Homme pour contrer les ambitions de Poutine en Géorgie et en Ukraine, avant de prendre fait et cause pour les Ouïghours opprimés par Pékin. Et surtout, élu en 2018 comme tête de liste socialiste, il a rempli avec constance et engagement son mandat de député européen. Au fond, n’est-ce pas un bon signe de voir un homme politique évoluer de la droite vers la gauche, quand les exemples contraires sont si nombreux ?
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Plutôt une bonne nouvelle, donc : si la nébuleuse insoumise se mobilise, c’est qu’elle prend la menace au sérieux. Dans les sondages (appelés bien sûr à bouger à l’approche de l’échéance), une liste socialiste conduite par Glucksmann arriverait en troisième position derrière les lepénistes et les macronistes, nettement devant LFI. Comme il existe un évident espace politique entre Macron et Mélenchon, ce score putatif peut encore s’améliorer si la campagne est de bonne qualité. Imaginons, horresco referens, que cette liste réformiste dépasse clairement les 10 % avec des Insoumis à 7 % : c’en est fini de la domination mélenchoniste sur la gauche. Un paysage nouveau émergera, qui marquera la résurrection d’une gauche de la raison et peut en trois ans construire une alternative au duel annoncé Renaissance-Rassemblement national. Une gauche rééquilibrée : c’est le cauchemar insoumis.
Encore faut-il jouer le jeu, élargir la liste au-delà du PS, proposer un projet neuf, réunir la mouvance réformiste aujourd’hui éparpillée et par là-même peu audible, se détacher clairement de la Nupes pour proposer demain un autre modèle d’Union de la gauche. Tous points sur lesquels la direction du PS devra se prononcer avec clarté. Y est-elle prête ?